Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/152

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semblable à la ville. Il le sentit bien dans ses monotones et continuelles promenades à travers les rues vides.

Car il en arrivait à être incapable de rester chez lui, effrayé de la solitude de sa demeure, du vent pleurant dans les cheminées, des souvenirs qui y multipliaient autour de lui comme une fixité d’yeux. Il sortait presque toute la journée, au hasard, désemparé, incertain de Jane et de son propre sentiment pour elle.

L’aimait-il vraiment ? Et elle-même, quelle indifférence ou quelle trahison dissimulait-elle ? Incertitudes lancinantes ! Tristes fins des après-midi d’hiver abrégées ! Brume flottante qui s’agglomère ! Il sentait le brouillard contagieux lui entrer dans l’âme aussi, et toutes ses pensées estompées, noyées, dans une léthargie grise.

Ah ! cette Bruges en hiver, le soir !

L’influence de la ville sur lui recommençait : leçon de silence venue des