Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/231

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pour la procession, éclairaient les salons comme des chapelles.

Jane, ironique, s’égayant avec perversité de l’irritation de Hugues, et la secrète envie de le narguer davantage, avait passé dans l’autre pièce, touchant à tout, bouleversant les bibelots, chiffonnant les étoffes. Tout à coup elle s’arrêta avec un rire sonore.

Elle avait aperçu sur le piano le précieux coffret de verre et, pour continuer la bravade, soulevant le couvercle, en retira, toute stupéfaite et amusée, la longue chevelure, la déroula, la secoua dans l’air.

Hugues était devenu livide. C’était la profanation. Il eut l’impression d’un sacrilège… Depuis des années, il n’osait toucher à cette chose qui était morte, puisqu’elle était d’un mort. Et tout ce culte à la relique, avec tant de larmes granulant le cristal chaque jour, pour qu’elle servît enfin de jouet à une femme qui le bafoue… Ah ! depuis longtemps