Page:Rodin - L’Art, 1911, éd. Gsell.djvu/240

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— C’est, me dit-il, l’époque de l’année où je prends la permission d’être malade.


— ? ? ?


— Mais oui ! Pendant tout le reste du temps, j’ai tant de besogne, d’occupations, de soucis, qu’il m’est tout à fait impossible de souffler un seul instant. Mais la fatigue s’accumule et j’ai beau lutter opiniâtrement pour la vaincre, quand approche la fin de l’année je suis forcé d’arrêter mes travaux pendant quelques jours.


Tout en recueillant ces confidences, je regardais contre la muraille une grande croix à laquelle était cloué un Christ, trois quarts nature.

C’était une sculpture peinte, d’un fort beau caractère. Le cadavre divin pendait comme une sublime loque au bois de supplice : chairs meurtries, exsangues, verdâtres, tête tombante et douloureusement résignée ; un dieu si mort qu’il semblait ne devoir jamais ressusciter : la consommation la plus complète du mystérieux sacrifice.


— Vous admirez mon crucifix ! me dit Rodin. Il