Page:Rodin - L’Art, 1911, éd. Gsell.djvu/61

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déchiffrer une âme ; aucun trait ne le trompe, l’hypocrisie est pour lui aussi transparente que la sincérité ; l’inclinaison d’un front, le moindre froncement de sourcils, la fuite d’un regard lui révèle les secrets d’un cœur.

Il scrute l’esprit replié de l’animal. Ébauche de sentiments et de pensées, sourde intelligence, rudiments de tendresse, il perçoit toute l’humble vie morale de la bête dans ses regards et dans ses mouvements.

Il est de même le confident de la Nature insensible. Les arbres, les plantes lui parlent comme des amis.

Les vieux chênes noueux lui disent leur bienveillance pour l’humanité qu’ils protègent de leurs branches éployées.

Les fleurs s’entretiennent avec lui par la courbe gracieuse de leur tige, par les nuances chantantes de leurs pétales : chaque corolle dans l’herbe est un mot affectueux que lui adresse la Nature.

Pour lui la vie est une infinie jouissance, un ravissement perpétuel, un enivrement éperdu.

Non pas que tout lui paraisse bon, car la souffrance qui s’attaque si souvent à ceux qu’il chérit et à lui-même démentirait cruellement cet optimisme.

Mais pour lui tout est beau, parce qu’il marche