Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/309

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mon arrivée, il me fit mille offres de services qui n’étoient point vaines, comme il me l’a prouvé dans une occassion essentielle où il s’est exposé à la mauvaise humeur de plus d’un de ses confreres, pour s’être montré vrai Pasteur envers moi. Je m’attendois d’autant moins de sa part à cette justice, qu’il avoit joué dans les précédentes brouilleries un rôle qui n’annonçoit pas un Ministre tolérant. C’est au surplus un homme assez gai dans la société, qui ne manque pas d’esprit, qui fait quelquefois d’assez bons sermons, & souvent de fort bons contes.

Je m’apperçois que cette Lettre est un livre, & je n’en suis encore qu’à la moitié de ma relation. Je vais, Monsieur le Maréchal, vous laisser reprendre haleine, & remettre le second tome à une autre sois.*

[*Pour apprécier les divers jugemens portés dans cette lettre, le Lecteur voudra bien faire attention à l’époque de sa date & au lieu qu’habitoit l’Auteur.]

SECONDE LETTRE AU MÊME.

Motiers le 28 Janvier 1763.

Il faut, Monsieur le Maréchal, avoir du courage pour décrire en cette saison le lieu que j’habite. Des cascades, des glaces, des rochers nuls, des sapins noirs couverts de neige sont les objets dont je suis entouré ; &, à l’image de l’hiver le pays ajoutant l’aspect de l’aridité ne promet, à le voir, qu’une description fort triste. Aussi a-t-il l’air assez nud en toute saison, mais il est presque effrayant dans celle-ci. Il faut donc vous