Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/408

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

multiplier des devoirs si charmans à remplir ! Dans la disposition d’elle où je vous vois tous les deux, non, je n’imagine aucun bonheur pareil au vôtre. Hélas ! quoiqu’on en puisse dire, la vertu seule ne le donne pas ; mais elle seule nous le fait connoître, & nous apprend à le goûter.

LETTRE À M****.

Motiers le 28 Mai 1764.

C’est rendre un vrai service à un solitaire éloigné de tout, que de l’avertir de ce qui se passe par rapport à lui. Voilà, Monsieur, ce que vous avez très-obligeamment fait en m’envoyant un exemplaire de ma prétendue lettre à M. l’Archevêque d’Ausch.

Cette lettre, comme vous l’avez deviné, n’est pas plus de moi que tous ces écrits pseudonymes qui courent Paris sous mon nom. Je n’ai point vu le Mandement auquel elle répond, je n’en ai même jamais ouï parler, & il y a huit jours que j’ignorois qu’il y eût un M. du Tillet au monde. J’ai peine à croire que l’Auteur de cette lettre ait voulu persuader sérieusement qu’elle étoit de moi. N’ai-je pas assez des affaires qu’on me suscite sans m’aller mêler de celles d’autrui ? Depuis quand m’a-t-on vu devenir homme de parti ? Quel nouvel intérêt m’auroit fait changer si brusquement de maximes ? Les Jésuites sont-ils en meilleur état que quand je refusois d’écrire contr’eux dans leurs disgraces ? Quelqu’un me connoît-il assez lâche,