Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/423

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LETTRE À M. BUTTA-FOCO. *

[*Cette lettre est une réponse à celle de M. Butta-Foco, du 31 Août 1764, dont voici l’extrait.

Vous avez fait mention des Cortes dans votre Contrat Social d’une façon bien avantageuse pour eux. Un pareil éloge, lorsqu’il part d’une plume aussi sincere que la vôtre, est très-propre à exciter l’émulation & le desir de mieux

faire. Il a fait souhaiter à la nation que vous voulussiez être cet homme sage qui pourroit lui procurer les moyens de conserver cette liberté qui lui a coûté tant de sang.

...............Qu’il seroit cruel de ne pas profiter de l’heureuse circonstance où se trouve la Corse pour se donner le gouvernement le plus conforme à l’humanité & à la raison ; le gouvernement le plus propre à fixer dans cette Isle la vraie liberté...........................

Une nation ne doit se flatter de devenir heureuse & florissante que par le moyen d’une bonne institution politique : notre Isle, comme vous le dites très-bien, Monsieur, est capable de recevoir une bonne législation, mais il faut un Législateur ; & il faut que ce Législateur ait vos principes, que son bonheur soit indépendant du nôtre, qu’il connoisse à fond la nature humaine, & que dans les progrès des tems se ménageant une gloire éloignée, il veuille travailler dans un siecle & jouir dans un autre. Daignez, Monsieur, être cet homme-là, & coopérer au bonheur de toute une nation en traçant le plan du systême politique qu’elle doit adopter.........................

Je sais bien, Monsieur, que le travail que j’ose vous prier d’entreprendre, exige des détails qui vous fassent connoître à fond notre vraie situation ; mais si vous daignez vous en charger, je vous fournirai toutes les lumieres qui pourront vous être nécessaires, & M. Paoli, Général de la nation, sera très-empressé à vous procurer de Corse tous les éclaircissemens dont vous pourrez avoir besoin. Ce digne chef & ceux d’entre mes compatriotes qui sont à portée connoître vos ouvrages, partagent mon desir & tous les sentimens d’estime que l’Europe entiere a pour vous, & qui vous sont dus à tant de titres, &c, &c.]

Motiers-Travers le 22 Septembre 1764.

Il est superflu, Monsieur, de chercher à exciter mon zele pour l’entreprise que vous me proposez. La seule idée m’éleve