Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/411

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LETTRE À MONSIEUR FRÉRON PAR MADAME D.L.M.

J’ai long-tems hésité à vous rendre compte du scandale que m’a causé la lecture de la seconde feuille de l’Année Littéraire : mais enfin, persuadée que, quand on dit la vérité avec autant de courage que vous, on doit l’aimer assez pour l’entendre sans dédain, quel qu’en soit l’organe, je me détermine à vous ouvrir mon cœur. Lorsqu’on a choisi un état qui rend dispensateur de la gloire, il ne suffit pas, Monsieur, de posséder au suprême degré le talent de l’analyse, d’être littérateur instruit, écrivain éloquent, observateur exact, critique éclairé, points sur lesquels vous êtes à l’abri de tout reproche, il faut encore être juge équitable. Or vous avez doublement manqué à ce devoir ; 1°. en anathématisant sans distinction, les deux fameuses Notes qui se trouvent pages 121, & 267 de l’Essai sur la vie de Séneque ; 2°. en privant M. Négeon, qu’on assure qui en est l’auteur, de la part qui lui est due, dans la condamnation que vous avez prononcée contre M. Diderot. Car ne vous y trompez pas, Monsieur, il n’y, a point d’Encyclopédiste, qui ne se croye rehaussé d’un cran, à chaque effort que vous faites pour combatre les maximes favorites de sa secte :