Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/136

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de cette résolution plus facile. Quand il eut remporté le prix, Diderot se chargea de le faire imprimer. Tandis que j’étois dans mon lit, il m’écrivit un billet pour m’en annoncer la publication & l’effet. Il prend, me marquoit-il, tout par-dessus les nues ; il n’y a pas d’exemple d’un succès pareil.

Cette faveur du public, nullement briguée & pour un auteur inconnu, me donna la premier assurance véritable de mon talent, dont malgré le sentiment interne, j’avois toujours douté jusqu’alors. Je compris tout l’avantage que j’en pouvois tirer pour le parti que j’étois prêt à prendre & je jugeai qu’un copiste de quelque célébrité dans les lettres ne manqueroit vraisemblablement pas de travail.

Sitôt que ma résolution fut bien prise & bien confirmée, j’écrivis un billet à M. de F

[ranceui] l pour lui en faire part, pour le remercier, ainsi que Mde. D[...]n, de toutes leurs bontés & pour leur demander leur pratique. F

[ranceui] l, ne comprenant rien à ce billet & me croyant encore dans le transport de la fièvre, accourut chez moi ; mais il trouva ma résolution si bien prise qu’il ne put parvenir à l’ébranler. Il alla dire à Mde. D[...]n & à tout le monde que j’étois devenu fou ; je laissai dire & j’allai mon train. Je commençai ma réforme par ma parure ; je quittai la dorure & les bas blancs ; je pris une perruque ronde ; je posai l’épée ; je vendis ma montre en me disant avec une joie incroyable : grace au ciel, je n’aurai plus besoin de savoir l’heure qu’il est. M. de F

[ranceui] l eut l’honnêteté d’attendre assez long-temps encore avant de disposer de sa caisse. Enfin, voyant mon parti bien pris, il la remit à M. d’Alibard, jadis gouverneur