Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/230

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Résolu à célébrer le grand jour en disant une fable à son amie, Séil-kor consacra une partie de ses nuits à cultiver en cachette sa mémoire et son intonation.

Projetant d’offrir en outre quelque présent à la fillette, il se promit de risquer au jeu les quelques pièces blanches qu’il devait à la générosité de Laubé.

Certain casino de Tripoli, aisément accessible, contenait un jeu de petits chevaux dont la mise pouvait convenir aux bourses les plus modestes.

Favorisé par la chance qui accompagne, dit-on, les premières tentatives, Séil-kor gagna promptement à l’aide d’une martingale et put commander, chez le meilleur pâtissier de l’endroit, un monstrueux gâteau de Savoie destiné à paraître au milieu de la fête.

Le bal, commencé dans le courant de la journée, emplit de joyeuse animation le grand salon de l’hôtel. Vers cinq heures, les enfants, passant dans une pièce voisine, s’assirent à une immense table chargée de fruits et de friandises. À ce moment on apporta, de la part de Séil-kor, le fameux gâteau, qui fut salué par de bruyantes acclamations. Tous les yeux fixèrent le donateur, qui, se levant sans aucun embarras, récita sa fable d’une voix claire et sonore. Au dernier vers les applaudissements éclatèrent de toutes parts, et Nina,