Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/282

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
214
LES PIERRES DE VENISE

cordait pas à ses soldats le droit au pillage ! Les pieds de sa statue couchée, revêtue de son armure, reposent sur un chien, et sa tête sur deux lions. Ces animaux, qui ne font pas partie de son blason symbolisent, — d’après Zanotto — sa bravoure et sa fidélité.


Sur la tombe de Michel Sténo, transférée de l’église détruite des « Servi » au bas côté nord de Saints-Jean-et Paul nous retrouvons la simplicité antique : le sarcophage, bien qu’il date du xve siècle, Sténo étant mort en 1513, n’est décoré que de deux croix entourées de quatre-feuilles. Observons la singularité de l’épitaphe qui loue Sténo d’avoir été « un amateur de justice, de paix et d’abondance ». Les épitaphes de cette époque tenaient compte aux hommes publics des qualités utiles à leur pays; ainsi Sansovino dit de Marco Cornaro : « c’était un homme sage, éloquent, il aimait, pour sa ville, la paix et l’abondance » : et, de Tomaso Mocenigo : « homme désireux par-dessus tout de la paix. »

Nous avons déjà mentionné la tombe du doge Mocenigo où, comme pour celle de Morosini, la présence des Vertus n’a rien d’ironique, bien que leur grande importance prouve les progrès de la vanité dans les monuments funéraires. Celui-ci est le dernier, à Venise, appartenant à la période gothique ; ses moulures ont déjà la raideur classique et, dans les angles, sont placées des figures insignifiantes, revêtues d’armures romaines. Toutefois, le tabernacle est encore gothique, et la statue couchée, sculptée, en 1428, par deux artistes florentins, est fort belle.


A Mocenigo succéda le fameux doge Francesco Foscari, sous le règne duquel furent exécutés les derniers agrandissements du Palais Ducal gothique qui, par leur