Page:Ryner - Le Subjectivisme, Gastein-Serge.djvu/19

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l’irritation par la seule pensée du choix. S’exaltant, ils le déclarent impossible et voici que d’un nœud indissoluble, ils prétendent lier les deux joies supérieures. Avec la frémissante sincérité de la peur, ils affirment, les uns, que boire est la seule façon d’arriver à rire, les autres, que le grand prix du rire, c’est qu’il conduit au boire. Depuis qu’il y a une philosophie, combien ont voulu tirer leur règle de vie de la science ou de la métaphysique. Mais, depuis Kant, combien s’efforcent de bâtir le palais de la connaissance sur les bases de la raison pratique.

Avec un sourire sans malice, je loue ceux-ci comme ceux-là. Leurs tentatives multipliées remplissent tout l’horizon philosophique de grands bruits d’écroulement. Mais ils s’encouragent à recommencer en chantant un concept métaphysique qui a le genre de vérité que je demande aux concepts de cet ordre : la beauté émouvante d’un baiser entre le sujet et l’objet. De l’homme à l’univers, ils jettent sur l’insondable abîme un pont de lumière qui tremble. Son frémissement me trompe-t-il quand il affirme entre moi et l’ensemble des choses un lien puissant et magnifique ? Il proclame aussi, le noble chant de clarté, entre l’univers et n’importe lequel de ses éléments, des rapports d’amour et l’attirance d’un joyeux vertige. « Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ; ce qui est en bas est comme ce qui est en haut. » Ah ! la vaste synthèse, et poétique à merveille. Mais on ne saurait la déterminer d’une façon positive et c’est par un amoureux mensonge que j’affirme quoi que ce soit sur le détail de ces rapports et sur leur mode. L’un des deux termes, — l’univers objectif — se dissipe, ombre vaine, sous l’effort de mes bras ; ou peut-être mes