Page:Ryner - Le Subjectivisme, Gastein-Serge.djvu/25

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moitié des problèmes sous prétexte de les résoudre. Ne tranchons pas, pauvres Alexandres affolés à la complexité adorable du réel, la grâce mille fois repliée des nœuds gordiens. Élargissons-nous au lieu de rétrécir les questions.

La beauté émouvante du Baiser qu’est l’univers, comment devient-elle, aux dogmes des philosophes, grimace et hostilité ? Ils ne touchent pas au mystère avec assez de tremblement et de délicatesse amoureuse. Ils ne cherchent pas à faire résonner sur l’instrument merveilleux les formules qui chantent et qui fuient ; mais, pour obtenir toujours la même note, ces barbares arrachent à la lyre une partie de ses cordes. Essayons l’harmonie qui ne pèse pas, qui n’insiste pas, qui bientôt, pour faire place à l’harmonie complémentaire, s’envole et se dissout. Que les ailes continûment balancées de nos rêves croisent dans les airs charmés des souvenirs de musiques.

Le déterminisme n’est pas l’ornière étroite et penchante où grince mon char. Au bord d’une route royale il dessine des ravins où, sous le frémissement des verdures, gazouille la continuité des ruisseaux. La cage où l’oiseau volette de l’un à l’autre barreau et varie mille fois ses attitudes, est-ce le déterminisme ? Tout au plus celui des mœurs et de la loi civile. Mais la loi naturelle est le soutien même de ma liberté, l’air qui porte le frémissement de mon vol. Et l’air, certes, ne s’étend pas à l’infini, mais il est peut-être plus vaste que mes forces et que mes regards. Pourquoi n’y a-t-il de science que du général, sinon parce qu’il est impossible de prévoir le tout d’un phénomène futur ? L’attribut de l’omniscience est une de ces contradictions criardes et profondes qui empêchent le concept d’un dieu personnel de