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LES MALHEURS DE SOPHIE.

pour la dévorer ensuite, il fit un bond prodigieux et s’élança sur elle. Les chiens, voyant le danger de leur petite maîtresse et excités par les cris d’épouvante de Mme de Réan et de Paul, redoublèrent de vitesse et vinrent tomber sur le loup au moment où il saisissait les jupons de Sophie pour l’entraîner dans le bois. Le loup, se sentant mordu par les chiens, lâcha Sophie et commença avec eux une bataille terrible. La position des chiens devint très dangereuse par l’arrivée des deux autres loups qui avaient suivi Mme de Réan et qui accouraient aussi ; mais les chiens se battirent si vaillamment que les trois loups prirent bientôt la fuite. Les chiens, couverts de sang et de blessures, vinrent lécher les mains de Mme de Réan et des enfants, restés tremblants pendant le combat. Mme de Réan leur rendit leurs caresses et se remit en route, tenant chacun des enfants par la main et entourée de ses courageux défenseurs.

Mme de Réan ne disait rien à Sophie, qui avait de la peine à marcher, tant ses jambes tremblaient de la frayeur qu’elle avait eue. Le pauvre Paul était presque aussi pâle et aussi tremblant que Sophie. Ils sortirent enfin du bois et arrivèrent près d’un ruisseau.

« Arrêtons-nous là, dit Mme de Réan ; buvons tous un peu de cette eau fraîche, dont nous avons besoin pour nous remettre de notre frayeur. »

Et Mme de Réan, se penchant vers le ruisseau, en but quelques gorgées et jeta de l’eau sur son