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SUR MADAME DE SÉVIGNÉ.


se prolonger. En voici le dernier épisode : M. de Maillane, procureur du pays pour la noblesse, était mort. Il s’agissait de le remplacer. M. de Grignan voulait faire nommer le marquis de Buous, son cousin germain. On savait que M. de Janson se préparait à faire de l’opposition à ce choix. C’est là cette affaire du syndicat, qui causa tant d’angoisses à madame de Sévigné, et lui fit, après la victoire, pousser de si grands cris de triomphe. Dans l’assemblée de 1673-1674, où elle devait être décidée, l’évêque de Marseille donna lecture d’une lettre que Colbert lui avait écrite, et dans laquelle il déclarait avec force que le roi voulait voir enfin cesser toute mésintelligence entre les deux maisons, ces discordes n’ayant déjà duré que trop longtemps, et nuisant au bien de son service. M. de Forbin Janson annonça en conséquence qu’il nommait Buous, et engagea ses amis à en faire autant ; ce qui assura l’élection. Madame de Sévigné écrivit alors à sa fille : « Nous trouvons l’évêque toujours habile et toujours prenant les bons partis : il voit que vous êtes les plus forts, et que vous nommez M. de Buous, il nomme M. de Buous. Nous voulons tous que présentement vous changiez de style, et que vous soyez aussi modestes dans la victoire que fiers dans le combat[1]. » M. de Janson voulut cependant, tout en obéissant au roi, faire une retraite honorable. Lorsque vint dans cette même assemblée la demande ordinaire de la gratification de cinq mille livres qu’il avait toujours trouvée irrégulière, il maintint son opposition, malgré les précédents et pour l’honneur des principes. Il savait bien qu’il serait passé outre. Madame de Sévigné s’écria que « ses procédés l’épouvantaient ; » mais elle conclut cependant que, le roi voulant la concorde, il fallait obéir. La belliqueuse madame de Grignan fut réduite à se plaindre « de l’ennui qu’elle avait de ne plus être agitée par la haine, » plainte que Mme de Sévigné avait tort de trouver très-plaisante[2].

Trois mois après, l’évêque de Marseille fut envoyé comme ambassadeur en Pologne pour l’élection d’un roi ; et le combat, qui eût peut-être continué sourdement, malgré la volonté royale, finit par l’éloignement des combattants.

  1. Lettre du 24 décembre 1673.
  2. Lettre du 25 décembre 1673.