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NOTICE BIOGRAPHIQUE


modernes, comme l’Histoire des variations qu’elle admirait avec enthousiasme. L’antiquité ne lui faisait pas peur. L’Histoire des Juifs de Josèphe la ravissait ; elle en parlait comme d’une lecture magnifique ; et sans doute parce que les grands historiens manquaient alors à la France, et que le style du jésuite Maimbourg « qui avait ramassé le délicat des mauvaises ruelles, » lui déplaisait fort, elle ne trouvait pas les Croisades comparables à la dernière des feuilles de Josèphe. Elle avait Salluste traduit[1], à côté de Tacite, qu’elle lisait dans le texte et qui était un de ses livres de prédilection. Elle écrivait à sa fille : « Avez-vous la cruauté de ne pas achever Tacite ? Laisserez-vous Germanicus au milieu de ses conquêtes ? Si vous lui faites ce tour, mandez-moi l’endroit où vous en êtes demeurée, et je l’achèverai[2]. » Sur ces mêmes tablettes de la petite bibliothèque des Rochers où sont Tacite, Salluste et Josèphe, nous apercevons l’Histoire de Théodose par Fléchier, la Vie de Bertrand du Guesclin, l’Histoire de Maohmet II, la Conjuration du Portugal, la Réunion du Portugal, la Découverte des Indes, l’Histoire des Vizirs, le Schisme d’Angleterre de Sanders, et l’Histoire de la Réformation de Burnet, la Vie du duc d’Épernon, celle du pape Sixte-Quint, sans compter tout ce que nous n’apercevons pas. Madame de Sévigné entretient sa fille du plaisir qu’elle trouve à lire toutes ces histoires. Elle voudrait

  1. L’exemplaire de la traduction de Salluste par l’abbé Cassagne, qui a appartenu à madame de Sévigné, et qui porte quatre fois sa signature, et sur le feuillet de garde, les mots : Du cabinet des Rochers, écrits de sa main, appartient aujourd’hui à M. Sainte-Beuve, juge au tribunal de la Seine. Le Musée Britannique possède également, dans la collection Egerton, les Vies des saints Pères du Désert, traduction d’Arnauld d’Andilly, portant la signature de madame de Sévigné et la mention : Du cabinet des Rochers. Une note, écrite, il y a quelques années, et qui nous a été communiquée, nous apprend que la même signature et les mots : Du cabinet des Rochers se trouvent aussi sur les premiers feuillets d’un livre de Brueys : du Fanatisme de notre temps, appartenant à M. le comte de Montalivet ; et que parmi les livres venant de la bibliothèque de madame de Sévigné, madame la comtesse de Tourette, son arrière-petite-fille, avait alors en sa possession l’Histoire de Mahomet II, par Guillet ; et M. Désiré de Broé l’Histoire du Triumvirat. Il existe probablement d’autres livres de cette même bibliothèque, dont nous n’avons pu connaître les possesseurs.
  2. Lettre du 12 juillet 1671.