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NOTICE BIOGRAPHIQUE


à Saint-Cyran, ce grand homme de Dieu, comme elle l’appelait, et à la mère Angélique Arnauld, jusqu’aux derniers jours de sa vie (décembre 1641). Nous laissons de côté les différences de doctrine qui se marquèrent de plus en plus entre la Visitation et Port-Royal. Nous voulons seulement constater que l’amitié entre les Arnauld et madame de Sévigné était toute préparée.

Il est difficile de savoir jusqu’à quel point les Coulanges pouvaient être liés avec Port-Royal ; mais, si nous ne nous trompons, il y a dans la belle mort si chrétienne de Saint-Aubin, au faubourg Saint-Jacques, cette mort comme on en fait en ce quartier-là, quelque chose qui semble venir de ce côté. Ce qui est plus certain, c’est que Renaud de Sévigné engagea de bonne heure sa nièce dans d’étroites relations avec les hommes de Port-Royal. Ce chevalier de Sévigné que nous avons vu commander un régiment, dans la guerre de la Fronde, et épouser madame de la Vergne, mère de madame de la Fayette, devint, en 1660[1], étant veuf alors, un des plus fervents pénitents de Port-Royal. L’année suivante, il fit bâtir un corps de logis attenant au monastère de Paris, et y vécut dans l’exercice de la plus austère piété. En 1669, il se retira à Port-Royal des Champs. Ce fut là que madame de Sévigné lui fit, en 1674, une visite, dont elle revint pénétrée de vénération pour cette solitude. « Ce Port-Royal, écrivait-elle, est une Thébaïde ; c’est un paradis ; c’est un désert où toute la dévotion du christianisme s’est rangée[2]. » Renaud de Sévigné y mourut le 16 mars 1676, âgé de soixante-six ans[3]. Nous avons déjà dit comment, par l’entremise sans doute

  1. Voir Port-Royal de M. Sainte-Beuve, tome IV, p. 488 et suiv. Une lettre de Renaud de Sévigné au R. P. dom Luc d’Achery, bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, en date du 3 octobre 1656, et dont l’autographe se trouve à la Bibliothèque impériale, montre que dès ce temps, c’est-à-dire quatre ans avant 1660, il était fort avancé dans les voies de la dévotion et pénétré déjà de quelques-uns des sentiments de Port-Royal. Nous donnons cette lettre dans les notes à la fin de la Notice (note 8).
  2. Lettre à madame de Grignan, 26 janvier 1674.
  3. Renaud de Sévigné avait fait, en 1670, ajouter trois côtés au cloître de Port-Royal des Champs devenu insuffisant. Besoigne, dans son Histoire de Port-Royal dit que madame de Sévigné, au mois d’août de cette même année, posa la première pierre du troisième côté. Mais M. Sainte-Beuve (Port-Royal, tome IV, p. 408, note 2) montre que Besoigne s’est trompé.