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1669

convenir que l’article de M. de Grignan ne fût sérieux : vous pourriez le voir encore si vous aviez gardé ma lettre, et pour moi, je m’en souviens mot pour mot. Cela étant, vous savez trop bien vivre pour répondre en badinant à un endroit où on a parlé tout de bon : aussi ne l’avez-vous pas fait, et quoique vous ayez affecté un air de raillerie, vous l’avez mêlé de choses sérieuses ; comme, par exemple, quand vous me priez d’écrire à M. de Grignan pour l’amour de vous que j’aime, peut-on prendre cela comme une plaisanterie ? Non, il n’est pas possible, et il ne faut pas que vous prétendiez me persuader que je n’entends point raillerie. Je ne l’ai jamais si bien entendue que je fais, et je ne me suis jamais si peu laissé aller au chagrin que la fortune m’a voulu donner ; mais surtout je n’ai jamais eu tant de disposition à vous aimer que j’en ai, je n’oserois plus dire ce terrible mot d’éperdument, mais à vous bien aimer. Au nom de Dieu, ma chère cousine, ne me donnez pas sujet de la vouloir changer[1].


99. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ AU COMTE
DE BUSSY RABUTIN.

À Paris, ce 1er  août 1669.

Puisque vous m’assurez que vous avez autant d’esprit qu’à l’ordinaire, je m’en vais vous écrire, avec promesse que si je suis jamais assez heureuse pour vous voir, et que

  1. En réponse à l’addition que nous avons reproduite dans la dernière note de la lettre précédente, Mme de Coligny a ajouté ce qui suit : « Voilà la dernière lettre que j’ai écrite au Roi. J’avois oublié de vous l’envoyer. Le cas que vous en faites m’en donne bonne opinion. »