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SUR MADAME DE SÉVIGNÉ.


naître à leurs amis l’espérance prochaine qu’ils avaient de la naissance d’un enfant. En effet, au commencement de l’automne de la même année, madame de Sévigné, qui était de retour à Paris[1], y accoucha d’une fille. Ce fut le plus grand événement de sa vie, puisque dans cette vie une fille si chèrement aimée devait prendre la première place. Les Mémoires d’Olivier d’Ormesson donnent la vraie date de la naissance de mademoiselle de Sévigné, sur laquelle ou a été longtemps induit en erreur par deux lettres de Bussy, mal datées dans ses Mémoires. Cette date est le 10 octobre 1646. D’Ormesson ne pouvait dans son journal se tromper sur un fait si bien connu dans sa famille, puisque sa mère et sa femme avaient seules assisté madame de Sévigné dans son accouchement. Les registres de la paroisse Saint-Paul confirment son témoignage avec une indubitable autorité. Ils portent que le dimanche 28 octobre 1646 fut baptisée Françoise-Marguerite, fille de messire Henri de Sévigné, chevalier marquis dudit lieu seigneur des Rochers, Bodegat, Buron, Plessis—Féal, etc., et de Marie de Rabutin, demeurant rue des Lions. Le parrain fut l’évêque de Chalon, Jacques de Neuchèze, la marraine, dame Claude-Marguerite de Gondi.

M. et madame de Sévigné comme le constatent les Mémoires de d’Ormesson, passèrent à Paris l’hiver qui suivit cette naissance, et y restèrent au moins jusqu’au mois d’août 1648. Un procès les y retenait ; et, vraisemblablement aussi, les plaisirs d’une société brillante qu’ils étaient faits tous deux

  1. Deux passages des lettres de madame de Sévigné peuvent, il est vrai, embarrasser : dans la lettre du 11 décembre 1675 : « Et vous, ma chère fille, qui êtes née et élevée dans ce pays (dans la Bretagne) ; » et dans la lettre du 28 août 1680, datée des Rochers : « Nous remettons votre nom dans son air natal. » Une mère ne se trompe pas dans ses souvenirs sur le lieu de naissance de sa fille. Cependant, quand on sait quelles étaient alors les difficultés et les lenteurs d’un voyage, comment croire que mademoiselle de Sévigné, née aux Rochers, le 10 octobre, ait été amenée à Paris et baptisée le 28 du même mois, à Saint-Paul ? Le plus simple est de penser que madame de Sévigné n’étant venue à Paris qu’au moment de faire ses couches, regardait sa fille comme véritablement Bretonne, et croyait pouvoir dire, un peu abusivement, qu’elle avait pris naissance aux Rochers.