Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 11.djvu/576

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4go NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE.

en effet, comme elle parle au sujet d’un livre qu elle avoit dessein de lire* « Je vous manderai, dit-elle à sa fille, s’il est à la portée de mon intelligence; s’il n’y est pas, je le quitterai humblement, renonçant à ta sotte vanité de faire l’éclairée, quand je ne le suis pas. » Mais si par hasard comme entraînée par son sujet elle s’élève et prend l’essor, c’est d’une manière sublime et lumineuse, et, ce qu’on ne peut assez admirer, c’est touj ours sans s’écarter des bons principes. Les lettres de la mère à la fille ont encore l’avantage que n’ayant été écrites que pour Mme de Grignan toute seule, et sans que Mme de Sévigné pût s’imaginer qu’elles seroient un jour entre les mains de tout le monde, elles surpassent pour le naturel, et même pour l’agrément, toutes celles qu’elle a écrites à ce qui n’étoit point cette chère fille. On en peut juger par ses lettres au comte de Bussy quelque admirables qu’elles soient, elles ne nous empêchent point de penser qu’elle écrit à son cousin; au lieu qu’en lisant celles-ci, nous croyons qu’elle parle à sa fille, et c’est donc une véritable conversation. Or que ne feroit-on point pour entendre parler Mme de Sévigné, si elle étoit encore vivante?

Il étoit question de mettre les lecteurs à portée de suivre le fil d’un si aimable entretien et je n’y pouvois parvenir qu’en arrangeant les tomes V et VI selon le même ordre chronologique qui a été observé dans les premiers volumes: les mêmes difficultés2 s’y sont rencontrées, et j’avoue que je me serois volontiers épargné une peine quine sera sentie qued’un très-petit nombre de personnes, si je n’avois cru que le rétablissement de la date des années, en contribuant à l’intelligence d’une infinité de choses qui sont comme dépendantes les unes des autres, contribueroit aussi la perfection du recueil. Le portrait de Mme de Grignan, qu’on a jugé à propos de mettre au frontispice du tome V, ne manquera pas de réveiller la curiosité du public pour les réponses de la fille à la mère. On se croit donc obligé d’avertir qu’à cet égard toutes les recherches qu’on a pu faire jusqu’à présent ont été vaines, et ne nous laissent aucune espérance pourl’avenir5. Mais quoiqu’onne puisse trop regretter une semblable perte, on trouvera toujours de quoi s’en consoler dans les lettres de la mère à la fille.

I. Voyez la lettre du i5 juin t68o, p. 4l et 42, tome VI. (Note de Perrin.) 2. Voyez la p âge xïx [notre page 48 1 ) de la Préface ci-devant. (Note du mime. ) 3. L’auteur* du Supplément au Dictionnaire historique de Morérî a dit p. 3r4, tome II, art. de Sévigné, que je faisois espérer le Recueil des lettres de Mme de Grignan à sa mère il est certain néanmoins qu’il n’a jamais été question que de la suite des lettres de Mme de Sérigné à sa fille. (Note du même.] L’abbé Gouget, d’après la note primitive de l’édition de IJÎy.