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498 NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE.

lecture plus attrayante pour le Roi en y entremêlant les lettres de sa cousine1. Il étoit difficile qu’après avoir obtenu les suffrages de juges aussi délicats, ces lettres demeurassent longtemps ignorées; ces premiers succès présageoient l’accueil qui seroit fait à leur publication. Les Mémoires du comte de Bussy Rabutin, publiés en 1696, coutenoient quelques lettres que Mme de Sévigné avoit écrites à son cousin dans sa jeunesse; elle n’étoit point nommée. Ces Mémoires, lus d’abord avec empressement, furent bientôt relégués parmi les matériaux de l’histoire, que l’on consulte rarement, et les lettres de Mme de Sévigné y demeurèrent ensevelies jusqu’en 1806. En 1697, la marquise de Coligny, fille aînée du comte de Bussy Rabutin, aidée des conseils du P. Bouhours, donna la première édition des lettres de son père. Les deux premiers volumes contiennent une partie des lettres que Mme de Sévigné et Bussy s’étoient écrites, depuis 1666 jusqu’à la mort du comte. Mme de Sévigné n’étoit désignée dans ce recueil que par la première lettre de son nom; mais on la reconnut bientôt, et l’on commença à porter un jugement éclairé sur son talent épistolaire. Bayle mit ses lettres fort au-dessus de celles de Bussy « Je ne vois personne, dit-il, qui doute que les lettres adoptives, et en particulier celles de Mme de Sévigné, ne soient meilleures que celles de iVl.de Rabutin. Cette dame avoit bien du sens et de l’esprit elle mérite une place parmi les femmes illustres de notre siècle. Je voudrois bien savoir quelque chose de l’histoire de celle-là, je la mettrois volontiers dans mon dictionnaire2. »

Lorsque Bayle écrivoitcet éloge, on ne connoissoit encore qu’une partie des lettres adressées au comte de Bussy Rabutin, et le talent de Mme de Sévigné ne s’étoit développé tout entier que dans sa correspondance intime avec Mme de Grignan. C’est là que son âme s’épanche, que sa plume court, pour ainsi dire, qu’elle cause plutôt qu’elle n’écrit, tandis que le souvenir de la témérité de Bussy semble la tenir presque continuellement en réserve. Mais ce trésor étoit conservé par Mme de Grignan comme la meilleure part de son héritage, et il n’étoit pas vraisemblable qu’elle consentît jamais à ouvrir au public ces archives de famille.

Il paroît qu’après la mort de Mme de Grignan, Mme de Simiane, cédant aux instances du comte de Bussy, son cousin, lui envoya des copies qu’elle avoit fait faire sur les originaux d’un assez grand nombre de lettres de son aïeul. Cela résulte d’une lettre de Mme de

«

1. Voyez la lettre du 28 décembre 1680.

2, Lettre de Bayle du 5 décembre 1698. Voyez ses OEuvres, tome IV, in-folio, p. 776. (Wote de l’édition de 181S.)