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aimez moins quand elles sont petites ; mais ce pauvre Grignan a bien affaire d’avoir la complaisance pour vous de lire de tels volumes. Je me souviens toujours de l’avoir vu admirer qu’on pût lire de longues lettres ; il a bien changé d’avis : je me fie à vous du moins pour ne lui pas montrer ce qui le pourroit ennuyer.

Je vous fais une réparation : je croyois que vous n’eussiez point fait réponse au Cardinal ; vous l’avez faite très-bonne. Il faut aussi que je vous avoue que j’ai supprimé méchamment les compliments de Mme de Villars ; je vous ai parlé d’elle dans mes lettres, et me suis bien gardée de vous dire tout ce qu’elle m’a dit. Ne soyez pas fâchée contre elle : elle vous aime et vous admire ; je la vois assez souvent ; elle aime à parler de vous, et à lire des morceaux de vos lettres : cela me donne pour elle un attachement très-naturel. Elle partira à Pâques, malgré la guerre ; elle en sera quitte pour revenir, si les Espagnols font les méchants. Comme ils ont beaucoup d’argent, ces Villars[1], aller et venir, et faire un grand équipage, n’est pas une chose qui mérite leur attention. On dit que les Anglois ont battu cinq vaisseaux hollandois, et que l’ambassadeur a dit au Roi que le Roi[2] son maître avoit commencé la guerre sur la mer, et qu’il le supplioit de lui tenir sa parole, et de la commencer sur la terre.

Vous savez, ma fille, ce que m’est le nom de Roquesante[3], et quelle vénération j’ai pour sa vertu. Vous pou-

  1. Lettre 260. — 1. Passage ironique : Villars avait peu de fortune. Il venait d’être nommé ambassadeur à Madrid. Voyez la lettre du 15 avril suivant.
  2. 2. Charles II, roi d’Angleterre, avait commencé les hostilités par l’attaque d’une flotte hollandaise ; il ne déclara la guerre que quelques jours après.
  3. 3. (M. J. Rafelis, marquis de Roquesante, sieur de Grandbois) con-