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1677

618. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ ET DE CHARLES DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris, vendredi 25e juin.

de madame de sévigné.

Vous êtes à Grignan, ma fille. Le chaud, l’air, la bise, le Rhône : premièrement, tout cela vous a-t-il été favorable ? Je vous demande ensuite des nouvelles du petit marquis et de Pauline. Je serai satisfaite sur toutes ces questions avant que vous receviez cette lettre ; mais il est impossible de ne pas dire ce que l’on pense dans le moment qu’on écrit, quoiqu’on en connoisse l’inutilité. Je suis fort contente des soins de tous vos Grignans : je les aime, et leurs amitiés me sont nécessaires par d’autres raisons encore que par leur mérite. M. de la Garde n’a pas balancé à croire que c’est moi, plutôt que Mme Gargan, que vous lui recommandez dans cette rue. Je fus hier, avec Mme de Coulanges, au Palais-Royal : oh, que je fais de poudre ! n’est-ce pas une de vos applications ? elle est fort juste et fort plaisante. Nous fumes très-bien reçues. Monsieur étoit chagrin, et ne parla qu’à moi, à cause de vous et des eaux. Madame me fit des merveilles d’abord ; mais quand l’abbé de Chavigny[1] fut entré, mon étoile pâlit visiblement : je dirois volontiers sur cet abbé comme les laquais : « Il faut qu’il ait de la corde de pendu. » La duchesse de V***[2]est favorite de Madame ; elle n’en met pas plus grand pot au feu pour l’esprit ni pour la conversation. Je regardois cette chambre et ces places

  1. Lettre 618. — 1 Voyez tome IV, p. 358, note 3.
  2. 2. La duchesse de Valentinois, Mme de Monaco. Le nom a été imprimé en entier dans l’édition de 1818. Celle de 1754, notre seule source pour cette lettre, n’a que l’initiale.