Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/227

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1677 lonne[1] : vous vous conduirez selon vos vues, et vous ne sauriez mal faire. Pour moi, si vous étiez assez robuste pour soutenir l’effort de ma présence, et que mon fils et le bon abbé voulussent aller passer l’hiver en Provence, j’en serois très-aise, et ne pourrois pas souhaiter un plus agréable séjour. Vous savez comme je m’y suis bien trouvée ; et en effet, quand je suis avec vous, et que vous vous portez bien, qu’ai-je à souhaiter et à regretter dans le reste du monde ? Je tâcherai d’y porter le bon abbé, et la Providence décidera. Pour vous montrer comme j’ai rendu fidèlement votre billet à Corbinelli, voici sa réponse.


de corbinelli.

Non, Madame, je ne gronderai point Madame votre mère : elle n’a point de tort, c’est vous qui l’avez. Où diable avez-vous pris qu’elle veuille que vous soyez aussi rondelette que Mme de Castelnau[2] ? N’y a-t-il point de degré entre votre maigreur excessive et un pâton de graisse[3] ? Vous voilà dans les extrémités : vous ressemblez à cet homme qu’un saint évêque ne vouloit pas faire prêtre. « Que voulez-vous donc que je fasse, Monsieur ! voulez-vous que je vole sur les grands chemins ? » Est-ce ainsi qu’un prodige doit raisonner ? Vous moquez-vous encore de mettre M. de Grignan aux mains avec Mme de Sévigné ? Vous me faites une représentation fort plaisante de la cascade de vos frayeurs, dont la réverbération vous

  1. 2. M. de Vendôme étoit gouverneur de Provence, et il n’arrivoit jamais dans son gouvernement que M. de Grignan ne prît ce temps-là pour se rendre à Grignan ou à la cour. (Note de Perrin.)
  2. 3. Voyez tome III, p. 76, note 13, et p. 348.
  3. 4. « Pâton (paston) se dit d’un petit oiseau bien gras, comme les guignards ; les ortolans sont de petits pâtons de graisse. » (Dictionnaire universel de Furetière.)