Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/271

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1677 ments ne consolent pas ceux qui sont vivement touchés ; mais parmi ceux qui la pleureront, il y aura bien des douleurs équivoques[1]. « On ne pouvoit plus la satisfaire ; sa mauvaise fortune avoit aigri son esprit. » Vous entendez tout ce que je veux dire. Je me suis un peu étendue sur cette mort : il m’a paru que vous m’écoutiez[2] avec attention. J’en fais de même, ma bonne, de tout ce que vous m’écrivez ; tout est bon, et quand vous croyez vous écarter, vous n’allez pas moins droit ni moins juste.

Vous avez fait une rude campagne dans l’Iliade : vous en parlez fort plaisamment[3]. On espère que celle de M. de Créquy sera plus heureuse, quoique son armée ait changé de nom, comme vous dites fort bien[4]. Les Allemands sont à Mouzon [5] : il y a bien loin de là où ils étoient il y a deux ans[6]. M. de Schomberg a été voir le maréchal de Créquy, disant qu’il sortoit de sa garnison

  1. 17. Les deux éditions de Perrin donnent : « Mais elle sera fort mal pleurée : toutes les douleurs sont équivoques. » — Les deux phrases suivantes manquent dans les impressions de la Haye et de Rouen.
  2. 18. « Mais il me semble que vous m’écoutiez. » (Édition de 1734.) — « Mais il me semble que vous m’écoutez. » (Édition de 1754.)
  3. 19. Dans le texte de la Haye : « fort pleinement. »
  4. 20. L’armée de Créquy était l’armée d’Allemagne ; peut-être dans sa lettre Mme de Grignan l’appelait-elle par une sorte d’ironie l’armée de France, puisque Créquy venait d’être obligé de se replier jusque sur la Moselle pour tenir tête au duc de Lorraine. — La phrase suivante manque dans les éditions de Rouen et de la Haye.
  5. 21. Le duc de Lorraine, qui se repliait sur Trèves et Philisbourg, était arrivé le 2 août à Mouzon (chef-lieu de canton des Ardennes, à quatre lieues et demie de Sedan), sur la rive droite de la Meuse. « Le lendemain, dit M. Rousset (Histoire de Louvois, tome II, p. 327), il s’éloignait désespéré, laissant Mouzon en feu, comme pour marquer par les ruines fumantes d’une ville française sur l’extrême frontière, le terme d’une course qui avait voulu être une invasion profonde jusqu’au cœur de la France. »
  6. 22. Avant la mort de Turenne et la retraite de Condé.