Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/275

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1677 vous serviez de vos maximes pour moi comme pour vous, je n’irois pas à Vichy. Votre petit-lait seroit, ce me semble, un assez joli remède. Je finis ce soir, pour achever quand j’aurai reçu votre lettre.

Mercredi matin 11e août.

Je la reçois, ma chère enfant, cette lettre du 4e ; elle est d’une assez jolie taille. Laissez-nous aimer et admirer vos lettres ; votre style est un fleuve qui coule doucement et qui fait détester tous les autres. Ce n’est pas à vous d’en juger ; vous n’en avez pas le plaisir, vous ne les lisez pas ; nous les lisons et les relisons, et nous ne sommes pas de trop mauvais juges : quand je dis nous, c’est Corbinelîî, le Baron et moi. Je reprends, ma fille, les derniers mots de votre lettre ; ils sont assommants : « Vous ne sauriez plus rien faire de mal, car vous ne m’avez plus : j’étois le désordre de votre esprit, de votre santé, de votre maison ; je ne vaux rien du tout pour vous. » Quelles paroles ! comment les peut-on penser ? et comment les peut-on lire ? Vous dites bien pis que tout ce qui m’a tant déplu, et qu’on avoit la cruauté de me dire quand vous partîtes. Il me paroissoit que tous ces gens-là avoient parié à qui se déferoit de moi le plus promptement. Vous continuez sur le même ton. Je me moquois d’eux quand je croyois que vous étiez pour moi ; à cette heure, je vois bien que vous êtes du complot. Je n’ai rien à vous répondre que ce que vous me disiez l’autre jour : « Quand la vie et les arrangements sont tournés d’une certaine façon, qu’elle passe donc cette vie tant qu’elle voudra[1] et même le plus vite

  1. 36. Dans l’édition de Rouen (1726) on n’a imprimé en italiques, comme étant le discours de Mme  de Grignan, que le premier membre de phrase, depuis quand jusqu’à façon ; dans l’impression de la