Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/358

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1677 il y a bien de la friponnerie dans le monde : toujours de grandes lettres ; je ne comprends pas comme vous pouvez faire[1]. Vous vous fâchez quand vous recevez trois des miennes à la fois : eh ! ma belle, sont-elles écrites de même ? Ne voyez-vous point que c’est quelquefois l’ouvrage de douze jours[2] ?

Je ne suis point du tout contente de ce que j’ai appris de la santé du Cardinal[3] : je suis assurée qu’il n’ira pas loin s’il demeure là[4] ; il se casse la tête d’application : cela me touche sensiblement. Je comprends votre tristesse de la mort de ce jeune chanoine ; je ne me le remets point. Je vois, comme vous, la Providence marquée dans l’opiniâtreté de ne lui pas donner ce qui le pouvoit guérir : il n’avoit garde de prendre l’émétique, qui l’auroit sauvé ; il faut que les Écritures soient accomplies. Nous croyons toujours que nous aurions pu faire ceci ou cela, et jamais on ne peut être convaincu, par exemple, de l’impossibilité de donner cet émétique ; parce que[5] ne faisant point ce qu’on ne fait pas, on croit cependant qu’on l’auroit pu faire : ainsi la dispute durera jusques à la vallée[6], où nous verrons tout.

J’approuve fort tous vos dîners aux fontaines différentes ; les changements de corbillons sont admirables. M. de Grignan est-il de cet avis ? a-t-il besoin de cette

  1. 10. « Comment vous pouviez faire. » (Édition de 1754.)
  2. 11. « De plusieurs jours. » (Ibidem.)
  3. 12. « Je ne suis point du tout contente de la santé du Cardinal (de Retz) ». (Ibidem.)
  4. 13. « Que s’il demeure à Commerci, il ne la fera pas longue. » (Ibidem.)
  5. 14. Les mots parce que... jusqu’à pu faire ne sont que dans l’édition de 1754, qui commence ainsi la phrase « Nous croyons toujours qu’il dépend de nous de faire ceci ou cela. »
  6. 15/ La vallée de Josaphat ou du jugement. Voyez le prophète Joel, chapitre III, versets 2 et 12.