Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/377

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1677 chapitre. Que vous êtes bien tous ensemble ! que vous êtes heureux de trouver dans votre famille ce que l’on cherche inutilement ailleurs, c’est-à-dire la meilleure compagnie du monde, et toute l’amitié et la sûreté imaginable ! Je le pense et le dis souvent, il n’y en a point une pareille. Je vous embrasse de tout mon cœur, et vous demande la grâce de m’aimer toujours[1] ; je donne le soin à ma fille de vous dire comme je suis pour vous, et comme je vous trouve digne de toute la tendresse qu’elle a pour vous.

Il faut un peu que je vous parle, ma fille, de notre hôtel de Carnavalet. J’y serai dans un jour ou deux ; mais comme nous sommes très-bien chez M. et Mme de Coulanges, et que nous voyons clairement qu’ils en sont fort aises, nous nous rangeons, nous nous établissons, nous meublons votre chambre ; et ces jours de loisir nous ôtent tout l’embarras et tout le désordre du délogement. Nous irons coucher paisiblement, comme on va dans une maison où l’on demeure depuis trois mois. N’apportez point de tapisserie[2] ; nous trouverons ici tout ce qu’il vous faut : je me divertis extrêmement à vous donner le plaisir de n’avoir aucun chagrin, au moins en arrivant. Notre bon abbé m’a fait peur : son rhume étoit grand ; une petite fièvre ; je me figurois que si tout cela eût augmenté, c’eût été une fièvre continue, avec une fluxion sur la poitrine ; mais, Dieu merci, il est considérablement mieux, et je n’ai plus aucune inquiétude.

Je recois mille amitiés de Mme de Vins. Je recois mille visites en l’air des Rochefoucaulds, des Tarentes ; c’est quelquefois dans la cour de Carnavalet, sur le timon de

  1. 3. Dans l’édition de 1754 : « et vous conjure de m’aimer toujours. » Cette édition n’a pas la suite de la phrase.
  2. 4. Ce premier membre de phrase n’est pas dans le texte de 1734.