Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/478

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1678 assez à l’homme qui se bat en duel à la comédie, et qui demande pardon à tous les coups qu’il donne dans le corps de son ennemi[1].

Les principaux officiers des deux partis prirent donc dans une conférence un air de paix, et convinrent de faire entrer du secours dans Mons. Mon fils étoit à cette entrevue romanesque. Le marquis de Grana[2] demanda à M. de Luxembourg, qui étoit un escadron qui avoit soutenu deux heures durant le feu de neuf de ses canons, qui tiroient sans cesse pour se rendre maîtres de la batterie que mon fils soutenoit. M. de Luxembourg lui dit que c’étoit[3] les gendarmes-Dauphin, et que M. de Sévigné, qu’il lui montra là présent, étoit à leur tête. Vous comprenez tout ce qui lui fut dit d’agréable, et combien, en pareille rencontre, on se trouve payé de sa patience. Il est vrai qu’elle fut grande ; il eut quarante de ses gendarmes tués derrière lui[4]. Je ne comprends pas comme

  1. 3. C’est peut-être encore une allusion, un peu moins exacte que plus haut (p. 214), à la scène XVI du Mariage forcé de Molière. S’il n’y avait pas dans notre texte : « à la comédie, » ce passage rappellerait plutôt ce marquis de la Trousse dont parle Mme  de Motteville, qui « étoit estimé brave, honnête homme et si civil, que même quand il se battoit en duel, ce qui lui arrivoit souvent, il faisoit des compliments à celui contre qui il avoit affaire ; lorsqu’il donnoit de bons coups d’épée, il disoit à son ennemi qu’il en étoit fâché et parmi ces douceurs, il donnoit la mort aussi hardiment et avec autant de rudesse que le plus brutal de tous les hommes. (Mémoires de Mme  de Motteville, tome II, p. 115.)
  2. 4. Voyez tome IV, p. 57, note 14.
  3. 5. C’étoit est au singulier dans le manuscrit que nous suivons.
  4. 6. « Le marquis de Sévigny, sous-lieutenant des gendarmes de Monseigneur le Dauphin, fut exposé plus de deux heures au grand feu du canon des ennemis. Il témoigna dans toute l’action une grande fermeté, et il perdit quarante hommes de la compagnie qu’il commandoit. » (Relation de la Gazette, mentionnée plus haut dans la note 1.)