Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/521

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1678 j’admire votre courage, votre conduite ; je suis persuadée du fonds de l’amitié que vous avez pour moi toutes ces vérités sont établies dans le monde et plus encore chez mes amies. Je serois bien fâchée qu’on pût douter que vous aimant comme je fais, vous ne fussiez point pour moi comme vous êtes. Qu’y a-t-il donc ? C’est que c’est moi qui ai toutes les imperfections dont vous vous chargiez hier au soir ; et le hasard a fait qu’avec confiance je me plaignis hier à Monsieur le Chevalier que vous n’aviez pas assez d’indulgence pour toutes ces misères ; que vous me les faisiez quelquefois trop sentir, que j’en étois quelquefois affligée et humiliée. Vous m’accusez aussi de parler à des personnes à qui je ne dis jamais rien de ce qu’il ne faut point dire vous me faites, sur cela, une injustice trop criante vous donnez trop à vos préventions quand elles sont établies, la raison et la vérité n’entre[1] plus chez vous. Je disois tout cela uniquement[2] à Monsieur le Chevalier ; il me parut convenir avec bonté de bien des choses, et quand je vois, après qu’il vous a parlé sans doute dans ce sens, que vous m’accusez de trouver ma fille toute imparfaite, toute pleine de défauts, tout ce que vous me dîtes hier au soir, et que ce n’est point cela que je pense et que je dis, et que c’est au contraire de vous trouver trop dure sur mes défauts dont je me plains, je dis « Qu’est-ce que ce changement ? » et je sens cette injustice, et je dors mal ; mais je me porte fort bien et prendrai du café, ma bonne, si vous le voulez bien.

Suscription : Pour ma fille.

  1. 2. Le mot entre est ainsi au singulier dans l’autographe
  2. 3. Uniquement est souligné dans l’autographe.