Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/544

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1679 terranée[1] ? C’est vous qui nous aviez mis le bouton si haut ; c’est vous qui nous avez coupé la gorge ; c’est vous que l’on cite pour faire voir qu’il n’y a qu’à être téméraire, et que Dieu a soin des cervelles démontées, car la vôtre l’étoit, Madame, aussi bien que celle de ma fille. Je vous déclare donc que je suis très-mal contente de vous, et que je ne suis point du tout, Madame (puisque vous le prenez par là, et que vous donnez toujours de méchants exemples), votre très-humble servante, etc.

Il me semble, Monsieur, que c’est là le vrai ton qu’il faut prendre avec elle ; je m’en vais en prendre un autre pour vous, et pour commencer à vous plaire, je vous dirai que notre pauvre femme ne se porte pas si mal qu’elle faisoit avant sa fièvre tierce ; les sueurs qu’elle a eues lui ont ôté des sérosités qui picotoient sa poitrine ; elle n’y sent aucun mal présentement : elle l’a toujours délicate, ses douleurs peuvent revenir, mais nous sommes toujours assurés qu’il n’y a ni ulcère, ni fluxion formée ; ce qui nous étonne, c’est qu’elle est toujours aussi maigre et aussi foible que lorsque nous craignions toutes ces choses : elle se gouverne un peu à sa fantaisie, et sous ombre de la philosophie de M. Descartes, qui lui apprend l’anatomie, elle se moque un peu des régimes et des remèdes communs. Enfin on ne mène pas une cartésienne comme une autre personne : elle m’assure qu’elle me soulagera bientôt de vous écrire, et qu’elle vous remerciera elle-même de tous vos soins tendres et vifs, quoique toujours dignes d’aller en litière avec elle[2]

  1. Lettre 719 (revue sur l’autographe). — 1. Voyez tome III, p. 500, note 1, et tome IV, p. 143.
  2. 2. Voyez tome III, p. 79 et la note 5.