Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/570

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1679 à ses amis. Le pape Urbain VIII[1] qui le reconnoissoit pour son parent, et qui sur ce pied-là l’auroit avancé, mourut dès qu’il commença de l’aimer. Le cardinal de Retz lui veut faire du bien : il ne passe pas l’année. J’en suis tout à fait fâché, car je l’aime de tout mon cœur.

Il y a près de quinze jours que le tonnerre tomba à demi-lieue d’ici ; de six personnes qui étoient sous un noyer il en tua trois, et il blessa fort les trois autres, comme vous pourriez dire de rendre un homme digne d’entrer dans le sérail, et de brûler sa femme en pareil endroit qu’il avoit été blessé. Voilà des effets bien bizarres du tonnerre. Pour moi, qui mérite d’autres châtiments que le feu du ciel, je ne l’appréhende pas. Il trouveroit peut-être dans mon voisinage où tomber plus justement que sur ma maison ; mais la pénitence est une espèce de cloche qui détourne quelquefois la nuée. M. de Dalet a appelé de la sentence de Riom ; ainsi vous verrez votre nièce cet hiver à Paris. Vous croyez bien que je ne demeurerai pas tout seul dans mes châteaux ; je demanderai permission au Roi, qui, je crois, ne me la refusera pas : cependant n’en dites encore rien, s’il vous plaît ; car vous savez que le maître ne veut pas qu’on compte assurément sur ses grâces. Je suis ravi que le bon abbé n’ait pas suivi le Cardinal. Il est encore[2] plus nécessaire que Son Éminence. Ma fille et moi nous assurons Mme  de Grignan de nos très-humbles services ; et pour vous, Madame, quelles tendresses n’avons-nous pas pour vous ?

  1. 2. Maffeo Barberini, Florentin ; Corbinelli était d’origine florentine. Urbain VIII mourut le 29 juillet 1644,
  2. 3. « Il vous est encore. » (Manuscrit de la bibliothèque impériale.) Ce manuscrit termine ainsi la lettre : « quelles tendresses ne vous faisons-nous pas ? »