Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/377

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un fort bon de la poudre de Josson, si la cicatrice de ma plaie avoit besoin de ce secours ; mais je suis guérie, grâce à Dieu, et à la vôtre[1], comme on dit ici : je me promène avec plaisir, et je récompense le temps perdu. Vous avez raison de louer l’abbé de Polignac comme vous faites ; il est vraiment très-aimable, et c’est une tête bien organisée que la sienne ; mais vous parlez bien légèrement de son frère : il me semble qu’il glisse des mains. Je plains fort M. et Mme de Guitaut : une transaction disputée me fait transir ; il n’y a donc rien de sûr. Vous soutiendrez la vôtre contre Aiguebonne, il est en malheur.


956. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN ET AU MARQUIS DE GRIGNAN.

Aux Rochers, mercredi des cendres, 7e mars.

Me voilà, ma chère Comtesse, tout aussi avancée que vous et que mon marquis. Je fis mon lundi gras avec la princesse : un petit dîner aussi bon, aussi délicat, aussi propre qu’il est possible ; elle me parla de mascarade, je lui lus celle de vos petits Indiens, que vous contez fort joliment. Hier, je donnai à dîner à un pauvre ami de la vérité, fort bon homme, fort saint homme, fort anachorète, qui étoit supérieur du séminaire de feu Monsieur d’Aleth[2], qui a puisé dix ans à cette source, qui a fermé les yeux et baisé les pieds au saint prélat, et puis s’est retiré dans sa famille. Il n’a parlé qu’à moi depuis deux ans qu’il est en ce pays : nous connoissons les

  1. 4. Plus haut (p. 73) : grâce à Dieu et la vôtre.
  2. Lettre 956. — 1. Nicolas Pavillon, évêque d’Aleth, mort le 8 décembre 1677. (Note de Perrin.)