Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/378

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1685 mêmes gens, nous avons les mêmes amis, nous pensons les mêmes choses : c’est un saint ; mais je ne suis pas sainte, voilà le malheur ; j’ai été fort aise de passer ainsi le mardi gras.

Mon fils est encore à Rennes, et je suis ravie qu’il y soit, parce qu’il est ravi d’y être. Il ne vous diroit point plus vrai que moi sur ma jambe : je vous ai dit la pure et sincère vérité ; quand ma petite dernière plaie[1] a été fermée, il s’est jeté aux environs un feu léger, et des sérosités se sont répandues en six ou sept petites cloches, qui se sont percées et séchées en même temps, à la faveur de votre eau d’arquebusade, dont je me suis souvenue, et qui en deux jours m’a remise en état de marcher : la toile Gauthier n’y étoit pas bonne ; elle avoit fait ce qu’il falloit, et votre eau a fait le reste. On dit que cela est assez ordinaire aux longues plaies : il se jette des sérosités entre cuir et chair, et comme elles ne s’en vont plus par la plaie, elles prennent cette voie et cela passe comme une flamme, surtout quand on a une eau de sa chère fille qui se trouve à point nommé pour tout guérir :

C’est ainsi qu’en partant je vous fais mes adieux.[2]

Après quatre mois de liaison et d’habitude, il falloit quelque séparation éclatante, c’est ce qui consomme la guérison : cela est ainsi, ma très-chère, et je m’en vais reprendre le train de mes promenades, interrompues seulement pendant quatre jours. Je suis assurée que vous voyez bien que je ne vous trompe pas ; je me suis fort bien portée de ma médecine, elle a bien raccourci mes sérosités. Trouvez-vous, ma fille, que je vous parle de

  1. 2. La petite édition de 1754 porte : « quand ma petite et dernière plaie. »
  2. 3. Vers du Thésée de Quinault, qui se trouve déjà au tome IV, p. 388.