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1680

849. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ ET DE CHARLES DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, ce mercredi 4e septembre.

de madame de sévigné.

Il me semble, ma fille, que vous m’enviez d’avoir vu toute la famille de votre père Descartes à Rennes ; il est vrai que vous en étiez plus digne que moi ; s’ils m’eussent prise pour une personne capable d’entendre leur philosophie, je n’aurois pas manqué de leur chanter

Point de saveur, de son, ni de lumière ;

mais ne pouvant pas bien répondre à leur prose, je n’osai les attaquer par vos vers : je les dis à Nantes à l’abbé de Bruc[1], qui en fut ravi et les voulut par écrit. Il y avoit une nièce à Rennes, à qui l’on seroit fort aise de persuader qu’elle est la moitié d’un tout, dont on ne croit être que la moindre partie. Corbinelli eût été amoureux de tout cela, et du jésuite encore[2]. Je vous ai conté tous ces fagots comme ceux des Rochers, et comme vous me contez quelquefois les vôtres ; que pourrions-nous conter, si nous ne contions des fagots ? Il est vrai qu’il y a fagots et fagots, et que les vôtres sont meilleurs que les miens.

Je ne croyois point que ce bon Évreux se fût cassé la tête[3] ; je pensois qu’il étoit mort de vieillesse. On peut dire de cette vie, comme de celle du père de Rodrigue :

En arrêter le cours,
Ce n’étoit que hâter la Parque de trois jours[4]

  1. Lettre 849. — 1. Mme de Sévigné en parle comme d’un ami dans sa lettre à d’Hérigoyen du 23 avril 1687.
  2. 2. Voyez la lettre du 14 août précédent, p. 23 et 24.
  3. 3. Voyez tome VI, p. 269, note 4, et ci-après (tome VII), p. 67 et 68 ; voyez aussi le Mercure de septembre 1680, p. 35 et suivantes.
  4. 4. Vers qui terminent dans les éditions de 1637 à 1656 la scène iii,