Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/65

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1680

pas que cela ne change, car il a de la raison et de l’acquis ; mais s’il ne remet pas la fortune dans notre maison, comme vous en avez peur et comme cela pourroit bien être, je crois que ce ne sera pas un coup sûr de dire que c’est faute de mérite[1] ; au contraire, et sur cela prenez garde aux gens heureux de ce siècle-ci : vous trouverez que la fortune n’est pas délicate en ses inclinations. Ma fille dit qu’elle pourroit bien être un joli garçon, qui feroit fort parler de lui sans être plus heureux que M. de Chantal[2] ni que moi.

Pour des réflexions, nous en faisons autant qu’une grande oisiveté en peut permettre[3] ; et pour de l’amitié pour vous, je vous assure qu’on ne peut en avoir[4] plus que nous en avons. Je crois aussi que vous nous aimerez toujours bien ; au moins si ce temps dure, la familiarité n’engendrera point en nous le mépris. Voilà toute la consolation que nous pouvons tirer d’une longue absence.

Je me réjouis de la meilleure santé de Mme de Grignan.

  1. 5. Voyez cependant la lettre du 5 mars 1686.
  2. 6. Le baron de Chantal, père de Mme de Sévigné, qui périt à trente ans au combat de l’île de Rhé.
  3. 7. Dans notre copie, on lit ici ces mots, ajoutés après coup, au-dessus de la ligne, par une autre main que celle de Bussy : « J’ai fait même des traductions de Martial et de Catulle, que je vous envoie : cela nous amuse, et vous amusera. » La première édition (1697) donne de plus cette petite phrase : « vous m’en direz votre sentiment, » à la suite de laquelle elle insère au milieu de la lettre (tome I, p. 379 à 404) la traduction en vers de soixante-huit épigrammes de Martial et de sept de Catulle. Ces traductions se trouvent à l’Appendice du tome VI dans l’édition de M. L. Lalanne.
  4. 8. Dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale : « qu’on ne peut pas en avoir, etc. ; » trois lignes plus loin : « entre nous, » pour « en nous ; » à la fin de la première phrase de l’alinéa suivant : « de Mme de Grignan, pour l’amour d’elle et pour l’amour de vous ; » l’avant-dernier paragraphe se termine par : « que me font les vôtres. »