Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 8.djvu/190

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comtesse, en lui envoyant votre paquet. J’admire toujours les jeux et les arrangements de la Providence. Elle veut que ce Rabutin d’Allemagne[1] , par des chemins bizarres et obliques, s’élève et soit heureux ; et qu’un comte de Bussy, l’aîné de sa maison, avec beaucoup de valeur, d’esprit et de services, même avec la plus brillante charge de la guerre[2] soit le plus malheureux homme de la cour de France. Oh bien ! Providence, faites donc comme vous l’entendrez : vous êtes la maîtresse ; vous disposez de tout comme il vous plait, et vous êtes tellement au-dessus de nous, qu’il faut encore vous adorer, quoi que vous puissiez faire, et baiser la main qui nous frappe et qui nous punit ; car devant elle nous méritons toujours d’être punis.

Je suis bien triste, mon cher cousin : notre chère comtesse de Provence, que vous aimez tant, s’en va dans huit jours ; cette séparation m’arrache l’âme, et fait que je m’en vais en Bretagne ; j’y ai beaucoup d’affaires, mais je sens qu’il y a un petit brin de dépit amoureux ; je ne veux plus de Paris sans elle, je suis en colère contre le monde entier, je m’en vais me jeter dans un désert. Eh bien, Monsieur et Madame ! en savez-vous plus que nous sur l’amitié ? Nous donnerions des leçons aux autres mais en vérité il est bien douloureux d’exceller en ce genre : ceux qui sont si sensibles sont bien malheureux. Parlons d’autre chose.

Vous savez la mort de votre ancien ami Vivonne ? Il [3]

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  1. 2. Dans l’édition de 1697 et dans les suivantes : “ce... Rabutin d’Allemagne, notre cadet de toutes façons. » II descendait de Christophe de Rabutin, quatrième fils d’Amé de Rabutin tandis que Mme de Sévigné et Bussy descendaient de Hugues de Rabutin, son fils ainé. Voyez la Généalogie.
  2. 4. Celle de mestre de camp général de la cavalerie légère
  3. 5. « M. le maréchal de Vivonne mourut à Chaillot, entre les mains