Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 8.djvu/202

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tant de soins, tant d’amitié, des billets si tendres? Je ne suis pas à l'épreuve de toute la tendresse que me donne une conduite si charmante. Nous ne cessons point de vous aimer et de vous admirer ; Monsieur le chevalier et moi nous nous cherchons si naturellement, que vous ne devez pas douter, ma chère bonne, que cette petite chambre ne soit ma demeure ordinaire; mais vous nous y manquez toujours, et d’une manière fort sensible. Vos portraits, qui sont autour de nous, ne nous consolent[1] pas. Il nous faut notre chère Comtesse, que nous ne trouvons plus ; et sur cela, les yeurougissent, tout est perdu. L’honneur même d’être servie présentement la première, en prenant du café[2], m’afflige au lieu de me consoler, tant mon cœur est peu sensible aux grandeurs de ce monde. Nous mangeons ensemble, nous sommes dans une parfaite intelligence et il est vrai que plus on connoît Monsieur le chevalier sur ce ton-là, plus on l’aime et on l’estime. Il me paroit que mon commerce ne lui déplaît pas ; enfin c’est ma destinée que cette petite chambre; il n’y en a point où vous puissiez être plus parfaitement aimée et estimée, pour ne pas dire honorée. Monsieur le chevalier a eu la goutte terrible aux deux mains. Vous verrez aujourd’hui qu’il est en état d’écrire. J’ai fait dire vos neuvaines : c’est toujours votre dévotion, j’espère ; et je ne doute nullement qu'elles ne vous conservent votre enfant [3] dont nous vous envoyons une fort jolie lettre. J’ai vu mes amies, qui sont en vérité les

    lieu dit l’écu de Rostain. c’était peut-étre une auberge ayant pour enseigne « à I’écu de Rostain. »

  1. 3. Il y a console, au singulier, dans l’original; et de même dix-sept lignes plus loin, conserve, au lieu de conservent.
  2. 4. Ces mots « en prenant du café, » ont été ajoutés après coup, par Mme de Sévigné, au-dessus de la ligne.
  3. 6 Le marquis de Grignan avait suivi le Dauphin comme volon-