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1104. DE MADAME DE SẺVIGNẺ ET DU MARQUIS DE GRIGNAN A MADAME DE GRIGNAN.

A Paris, ce mercredi 15e décembre.

DE MADAME DE SÉVIGNÉ.

Me voilà plantée[1] au coin de mon feu ; une petite table devant moi, labourant depuis deux heures mes lettres d’affaires de Bretagne ; une lettre à mon fils, que je renvoie à M. de Chaulnes pour les nouvelles, car il est à Rennes[2] et puis je me vais délasser et rafraîchir la tête à écrire à ma chère fille. Votre renversement de phrase m’a donné du goût pour cette folie ; mais bon Dieu avec quel agrément finissez-vous cette période ! avec une tendresse trop aimable. Vous écrivez divinement, je suis sûre que vous n’y pensez pas, et que tout ce que vous dites sur cela coule de source de votre cœur au bout de votre plume ; mais c’est cela qui n’a point de prix, et que je sens fort tendrement. Il est donc certain [3] que je me repose en vous écrivant, et d’autant plus que voilà notre petit héros qui n’est point poétique, qui revient de Versailles, et qui prendra la plume quand je voudrai, pour vous conter ses faits et gestes de [4] comme la renommée vous a conté ceux de Philisbourg et de Manheim.

J’approuve fort la réponse que vous voudriez que Monsieur le Dauphin eût faite à la lettre de M. de Montausier[5] cela eût été parfait et digne du héros. On voit

  1. LETTRE 1104- 1. Me voici plantée, etc. » (Édition, de 1754.)
  2. 2. Ce membre de phrase: « Une lettre à mon fils, etc., » n’est pas dans le texte de 1737. Celui de 1754 n’a pas les deux phrases suivantes « Votre renversement. » et « Vous écrivez. »
  3. 3. Il est certain, etc. » (Édition de 1764.)
  4. 4.Versailles « De la cour. » (Ibidem.)
  5. 5. Voyez la lettre du 1er décembre précédent, p. 292 et 293.