Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 8.djvu/370

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vous demeurerez fort bien à Aix jusqu’à Pâques le carême y est plus doux qu’à Grignan. La bise de Grignan qui vous fait avaler tous les bâtiments[1] de vos prélats, me fait mal à votre poitrine [2], et me paroit un petit camp de Maintenon [3]. Vous ferez de ces pensées tout ce que vous voudrez ; pour moi, je ne souhaite au monde que de pouvoir travailler avec ma chère bonne, et achever ma vie en l’aimant[4] et en recevant les tendres et pieuses marques de son amitié ; car vous me paroissez le pieux Énée en femme.

J’ai vu Sanzei; je l’ai embrassé pour vous; il s’est mis à genoux ; il m’a baisé les pieds ; je vous mande ses folies, comme celles de don Quichotte : il n’est plus mousquetaire, il est lieutenant de dragons ; il a parlé au Roi, qui lui a dit que s’il servoit avec application, on auroit soin de lui. Voilà où il lui seroit bien nécessaire d’être un peu Monsieur du pied de la lettre. Vous ne sauriez croire comme cette qualité, qui nous faisoit rire[5], est utile à votre enfant, et combien elle contribue à composer sa bonne réputation : c’est un air, c’est une mode d’en dire du bien. Mme de Verneuil, qui est revenue, commença hier par là, et vous fit ensuite mille amitiés et mille

  1. 9. La poudre de tous les bâtiments. » (Édition de 1554.)
  2. 10. La mère ne pouvoit exprimer plus laconiquement, ni avec plus d’énergie, le mal qu’elle souffroit quand elle craignoit pour la poitrine de sa fille. (Note de Perrin, 1754.) Comparez le commencement de la lettre du 2 octobre 1671, tome II, p. 392.
  3. 11. Voyez tome VII, p. 392, note 1 et ci-dessus, p. 140, note 9.
  4. 12. « tout ce que vous jugerez à propos; pour moi, je ne souhaite que de pouvoir achever ma vie avec ma chère fille, en l’aimant. (Édition de 1737)
  5. 13. Ce membre de phrase « qui nous faisoit rire, » et les deux dernières phrases de l’alinéa, manquent dans l’impression de 1737.