Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/145

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de la solitude[1] de l’entre chien et loup ; je ne souhaite que de m’y retrouver ; je ne fais rien que par raison et par politique. Voici une invention de me faire passer les jours avec une langueur qui me fera vivre plus longtemps qu’à l’ordinaire : Dieu le veut. Je conserverai ma santé autant que je le pourrai ; je suis ravie de la perfection de la vôtre, et du meilleur état de Monsieur le chevalier. Ma chère enfant, je vous embrasse, et vous dis adieu. Nous n’étions pas encore assez loin : voyez Auray sur la carte.

1201. DE MADAME DE SÉVIGNÉ

A MADAME DE GRIGNAN.

A Auray, ce samedi 30è juillet.

REGARDEZ un peu où je suis, ma chère enfant : me voilà sur la côte du midi, sur le bord de la mer. Où est le temps que nous étions dans ce petit cabinet à Paris, à deux pas l’une de l’autre LETTRE 1201. 1. Le cabinet de Mme de Sévigné à l’hôtel Carnavalet était à l’extrémité de l’appartement sur le jardin. On y communiquait du salon et de la chambre à coucher, qui était éclairée sur la cour.</ref>  ? Il faut espérer que nous nous y retrouverons. Cependant voici où la Providence me jette :je vous écrivis lundi de Rennes tout ce que je pensois sur ce voyage ; nous en partîmes mardi. Rien ne peut égaler les soins et l’amitié de Mme de Chaulnes :son attention principale est que je n’aie aucune incommodité, elle vient voir elle-même comme je suis logée ; et pour M. de Chaulnes, il est souvent à table auprès de moi, et je l’entends qui dit entre bas et haut « Non Madame, cela ne lui fera point de mal, voyez comme

  1. 11« De la tristesse et de la solitude, etc. » (Édition de 1754.)