Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/567

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aurions fait des réflexions que l’éloignement met hors de portée de faire.

Je viens de recevoir des lettres de Paris, par lesquelles on me mande que le prince d’Orange n’est pas mort, et qu’il n’y a que M. de Schomberg[1]. Nous aurions été plus aises de la mort de celui-ci[2] si on ne nous avoit fait attendre à l’autre ; mais ce sera pour une autre fois. Les armées de Flandre sont si proches, qu’il semble qu’elles aient encore envie de se battre[3] ; celles d’Allemagne se regardent, le Rhin entre-deux[4] Il faut tout recomman- [5]

  1. 2. Voyez ci-dessus, p. 559, note 4, et plus bas la lettre à Mme de Grignan, du 27 août, p. 568.
  2. 3. Au lieu de « la mort de celui-ci, » Bussy avait d’abord voulu écrire « cette mort. »
  3. 4. Le marquis de BouffIers avait fait sa jonction avec le duc de Luxembourg, et l’électeur de Brandebourg avec le prince de Waldeck. Voyez la Gazette du 12 août.
  4. 5. Au commencement d’août l’armée française était près de Lan-
  5. LETTRE 1295. -- 1. Le prince d’Orange fut blessé le 10 juillet, veille de l’affaire de la Boyne. Il fut distingué dans une reconnaissance ; l’ennemi envoya vis-à-vis de lui un corps de cavalerie qui masquait deux pièces de campagne. Plusieurs personnes de la suite du prince furent tuées à ses côtes, et lui-même fut blessé à l’épaule. Aussitôt le bruit de sa mort se répandit et parvint à Paris en très-peu de jours. On s’y livra à des démonstrations de joie, qui, comme le dit le président Hénault, font grand honneur à ce prince. (Note de l’édition de 1818.) « Le prince d’Orange, dit la Gazette du 29 juillet, a été dangereusement blessé à l’épaule d’un boulet de canon, et a eu un autre coup à la jambe. La consternation qui a paru dans le camp des ennemis fait croire qu’il est mort de ses blessures. » -On lit dans le Journal de Dangeau, tome III;, p. 1 83 « A Paris on a fait des feux de joie sur la nouveLIe de la mort du prince d’Orange, que le Roi n’a pas approuvés ; mais les magistrats n’ont pas pu contenir le peuple. » Et Saint-Simon ajoute « On ne se contenta pas à Paris de feux de joie sur la prétendue mort du prince d’Orange ; ce furent des tables établies dans les rues, où les passants étoient arrétés pour boire, et il n’étoit pas sûr de le refuser. Les carrosses et les plus grands seigneurs subissoient comme les autres cette folie qui s’étoit tournée en fureur, dont le prince d’Orange fut encore plus flatté, quoique piqué, et que la police eut grand’peine à faire cesser. »