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POÉSIES

Le soleil un instant voilera son visage,
Et sans la rallumer laissera son image
S’éteindre au fond de l’eau,

Ce sera l’heure alors. Et quand, d’un flot docile
Mollement ramenés vers un retour facile,
Et poussés par le flux,
Les joyeux promeneurs regagneront la terre,
Celui que, le matin, ils virent solitaire,
Ils ne le verront plus.



LE SONGE


Quand autrefois dans cette arène,
Où tout mortel suit son chemin,
En coureur que la gloire entraine,
Je m’élançais, l’âme sereine,
En flambeau brillant à la main ;

Des Muses belliqueux élève,
Quand je rêvais nobles assauts,
Couronne et laurier, lyre et glaive,
Étendards poudreux qu’on enlève,
Baisers cueillis sous des berceaux ;

Partout vainqueur, amant, poëte,
Pensais-je, hélas ! que mon flambeau,
Au lieu de triomphe et de fête,