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tragedie.


Livilla

Ton amour m’enſeigna ce crime abominable,
Peut-on eſtre innocent lors qu’on aime un coupable ;
J’eus recours aux forfaits pour t’atacher à moy,
Tu n’eſpouſeras point Livilla malgré toy ;
Mais Agrippine auſsi ne ſera point ta femme,
Ne pouvant eſtouffer cette ardeur qui t’enflame
Sans t’arracher la vie, où loge ton amour
I’ay mieux aimé barbare en te privant du iour,
Precipiter le vol de mon heure fatalle,
Que de te voir heureux aux bras de ma rivalle.

Seianus

La mort, dont vous penſez croiſtre mon deſeſpoir,
Délivrera mes yeux de l’horreur de vous voir :
Nous ſerons ſeparez, eſt-ce un mal dont ie tremble ?

Livilla

Tu te trompes encor, nous partirons enſemble :
La Parque au lieu de rompre allongera nos fers ;
Je t’accompagneray iuſques dans les Enfers :
C’eſt dans cette demeure à la pitié cachée,
Que mon ombre ſans ceſſe à ton ombre attachée,