Page:Savinien Cyrano de Bergerac - La mort d'Agrippine - 1654.djvu/104

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tragedie.

Ie tiens qu’il eſt ſi beau de choir pour voſtre cauſe,
Qu’un ſi noble mal-heur borne tout ce que i’oſe ;
Et déja mes travaux ſont trop bien reconnus,
S’il eſt vray qu’Agrippine ait pleuré Sejanus.

Agrippine

Moy pleurer Sejanus ? Moy te pleurer, Perfide ?
Ie verray d’un œil ſec la mort d’un Parricide :
Ie voulois, Sejanus, quand tu t’offris à moy,
T’eſgorger par Tibere, ou Tibere par toy,
Et feignant tous les iours de t’engager mon ame,
Tous les iours en ſecret ie devidois ta trame.

Seianus

Il eſt d’un grand courage & d’un cœur généreux,
De ne point inſulter au ſort d’un mal-heureux :
Mais i’en ſçay le motif ; pour effacer la trace
Des ſoupçõs qui pourroiẽt vous joindre à ma diſgrace,
Vous bravez mes mal-heurs encor qu’avec regret,
Afin de vous purger d’eſtre de mon ſecret :
Madame, ce n’eſt pas connoiſtre mon genie :
Car i’aurois fort bien ſceu mourir ſans compagnie.