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tragedie.


Agrippine

Mais il faut, t’annonçant ce que tu vas ſouffrir,
Que tu meure cent fois avant que de mourir.

Seianus

I’ay beau plonger mon ame & mes regards funebres
Dans ce vaſte neant & ces longues tenebres,
I’y rencontre partout un eſtat ſans douleur,
Qui n’eſleve à mon front ny trouble ny terreur ;
Car puiſque l’on ne reſte apres ce grand paſſage,
Que le ſonge leger d’une legere image ;
Et que le coup fatal ne fait ny mal ny bien
Vivant, parce qu’on eſt, mort, parce qu’on eſt rien :
Pourquoy perdre à regret la lumiere receuë,
Qu’on ne peut regretter apres qu’elle est perduë ;
Penſez vous m’eſtonner par ce foible moyen,
Par l’horreur du Tableau d’un eſtre qui n’eſt rien,
Non quand ma mort au Ciel luiroit dans un Comette,
Elle me trouvera dans une ferme aſsiette
Sur celle des Catons ie m’en vais encherir,
Et ſi vous en douttez venez me voir mourir.
Marchez Gardes,