Page:Sayous - Jésus-Christ d’après Mahomet.djvu/89

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Reste le plus curieux de tous ces passages soi-disant messianiques, à savoir les paroles de son grand discours par lesquelles Jésus annonce à ses disciples la venue du Consolateur[1]. Ici l’exégèse coranique vient s’unir à l’interprétation de l’Évangile. En effet nous avons vu tout-à-l’heure que Jésus avait annoncé la venue après lui d’un apôtre dont le nom devait être Ahmed (ou Mohammed, l’illustre, le glorifié). Les théologiens ultérieurs, qui connaissaient le texte de Saint-Jean, imaginèrent un moyen de préciser, et de légitimer en même temps, la prédiction : il suffisait pour cela de remplacer παϱάϰλητος, consolateur, par πεϱιϰλυτὸς, illustre, et de la sorte le Saint-Esprit se trouvait transformé en Mahomet. C’est lui, Mahomet, l’esprit de vérité qui enseignera toutes choses. Et si les chrétiens se plaignent de cette falsification impudente, on leur répondra que ce sont eux qui ont falsifié leur Évangile, et que le Prophète le leur a dit. La bizarre fabrication du soi-disant Évangile de Saint-Barnabé a dû être imaginée en grande partie pour donner au jeu de mots attribué par le Coran à Jésus-Christ sur le nom du prophète arabe[2] la consécration d’une haute antiquité, chrétienne, et l’autorité du compagnon de Saint-Paul.

Telle est la prophétie messianique de Mahomet et des Musulmans : si bizarre qu’elle soit, elle est utile à connaître pour les historiens de l’Église et pour les missionnaires, plus utile à vrai dire pour les chrétiens qu’honorable pour la théologie musulmane et pour son fondateur.




  1. Jean XIV, 16 et 26, et XV, 26.
  2. Fabricius, Cod. apocr. III. loc. cit.