Page:Schiff - Marie de Gournay.djvu/38

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comme dans son examen détaillé « de la façon d’escrire de messieurs Du Perron » et Bertaut et dans sa « lettre sur l’art de traduire les orateurs » . Parfois son amour du passé lui inspire de violentes apostrophes contre les novateurs. Irréconciliable ennemie de l’écorcheuse académie[1], « elle avoit, dit Sorel, des emportemens horribles quand elle parloit des gens de la nouvelle bande, ou de la nouvelle caballe[2]. » Elle se vante d’ailleurs de ne point observer ce nouveau langage, qui fait tant de bruit, et d’employer tous les mots qu’il défend si ses grands auteurs en ont usé. Elle déclare aussi qu’elle veut écrire, rimer et raisonner de toute sa puissance à la mode de Ronsard[3], de Du Bellay et de Desportes, et aussi à celle de Du Perron et de Bertaut qu’elle reproche à la « nouvelle bande » d’avoir feint d’approuver de leur vivant pour tomber sur eux « a son de trompe et profession ouverte apres leur mort. » Pour Marie de Gournay, les nouveaux vont de l’avant « comme gens qui n’ont exemple ferme, ny visée ou butte expresse. »

  1. Mot de Chapelain dans une lettre à Mademoiselle de Gournay.
    Cf. Lettres de Jean Chapelain publiées par Tamizey de Larroque (Paris, 1880), t. I, lettre CCCXXXVI.
  2. Sorel, De la connoissance des bons livres, ou examen de plusieurs autheurs (Paris, 1671), p. 378.
  3. Dans son traité de la Connaissance des bons livres, Sorel recommande en ces termes la lecture des mélanges de Marie de Gournay aux personnes qui s’intéressent à la langue française : « Ils y trouveront plusieurs chapitres du langage françois, entre autres le chapitre des diminutifs, et quelques-uns touchant la Poësie, ou elle veut remettre en crédit les mots composez à l’imitation des Grecs, et faire toujours subsister sans aucune exception, le langage de Ronsard. »