Page:Scott - Le Pirate, trad. de Defauconpret, Librairie Garnier Frères, 1933.djvu/19

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tuée sur le bord d’un voe qui amène les harengs à votre porte, vous vous trompez, mon ami. Vous ne verrez à Iarlshof que la mer se brisant contre les rochers.

— Au moins je n’y verrai pas le courant des passions humaines.

— Vous n’y entendrez que les cris des mouettes et le mugissement des vagues, depuis le lever du soleil jusqu’à son coucher.

— J’y consens, mon bon ami, pourvu que je n’entende pas le caquetage des langues femelles.

— Ah ! vous parlez ainsi parce que vous venez d’entendre mes filles, Minna et Brenda, chanter dans le jardin avec votre Mordaunt. Eh bien ! j’ai plus de plaisir à écouter leurs petites voix que l’alouette que j’ai ouïe une fois à Caithness, ou le rossignol que je ne connais que par les livres. Que deviendront ces pauvres filles quand elles n’auront plus Mordaunt pour jouer avec elles ?

— Elles sauront y pourvoir. Jeunes ou vieilles, les femmes trouvent des compagnons ou des dupes. La question, monsieur Troil, est de savoir si vous voulez me louer cette vieille maison d’Iarlshof ?

— Bien volontiers, puisque vous acceptez une pareille solitude.

— Et quelle sera la redevance ?

— La redevance ! Hem ! il faut que vous ayez un potager et un merk de terre, afin qu’on puisse pêcher pour vous. Croyez-vous que huit lispunds[1] de beurre et huit schillings sterling par an soient trop ?

M. Mertoun accepta des conditions si raisonnables, et depuis lors il occupa la maison solitaire que nous avons décrite, se résignant sans plainte, et même, à ce qu’il semblait, avec un sombre plaisir, à toutes les privations qu’entraîne une position si écartée et si sauvage.

  1. Lipsund, environ trente livres anglaises ; sa valeur est estimée par le docteur Edmonston à dix schellings sterling.