Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/40

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n’aime point, il m’importe encore de ne vous l’avoüer pas : puis que croyant (à ce que je puis comprendre par le diſcours de la Princeſſe) que l’on ne peut eſtre en quelque ſorte honneſte homme ſans eſtre amoureux, je ne dois pas vous preocuper à mon deſavantage. Quoy qu’il en ſoit, dit Doraliſe, encore que vous ne veüilliez pas parler plus preciſément, je ne laiſſeray pas de le sçavoir avec certitude devant qu’il ſoit peu : car ſi vous l’eſtes à Claſomene, vos inquietudes & vos chagrins me le teſmoigneront allez : & ſi vous l’eſtes à Sardis, je le sçauray encore plus infailliblement. Mais s’il ne l’eſt en nulle part, comme je le croy, dit la Princeſſe, il ne manqueroit donc rien à Perinthe, de tout ce que vous deſirez : il luy manqueroit encore une choſe auſſi neceſſaire que toutes les autres, reprit elle, c’eſt qu’il m’aimaſt autant qu’il pourroit aimer. Mais de cela Madame, ne luy en demandez rien je vous en conjure, puis que je ſuis aſſuré qu’il ne m’aime pas : & ſi je l’eſtois auſſi parfaitement qu’il n’aime rien, je le regarderois comme un miracle. Comme Perinthe alloit reſpondre, un officier de la Princeſſe Palmis interrompit la converſation : car il vint sçavoir de la ſanté de la Princeſſe, & luy demander ſi elle croyoit eſtre en eſtat de pouvoir ſe trouver le lendemain à une partie de Chaſſe, qu’elles avoient reſoluë il y avoit deſja quelques jours : ou ſi elle vouloit qu’on remiſt ce divertiſſement à une autrefois. La Princeſſe, qui n’avoir pas un mal conſiderable, & qui jugea bien qu’elle en ſeroit delivrée le jour ſuivant, luy manda que bien loin de vouloir differer un plaiſir qu’elle devoit recevoir, elle chercheroit touſjours à luy en donner ; & qu’ainſi elle croyoit la pouvoir aſſurer,